Les mauvais choix des dirigeants français
En reprenant l’évolution du
PIB en France depuis 2008, le chiffre de 0,4%/an en moyenne reste
« flat » comparé aux 2,4%/an sur la période 2002-2008 (soit +452 Mds€)
et aux 3,2%/an entre 1992 et 2002 (+441Mds€) (source Eurostat) mais correspond
aussi à une évolution somme toute prévisible de l’économie française par
l’introduction en janvier 2002 d’une monnaie de 6 fois supérieure à celle de
son économie! Si en effet nous nous reportons aux chiffres de l’Eurozone sur
les mêmes périodes, la monnaie unique a eu un impact sur le PIB global de -1,3%/an
en moyenne depuis 2008 et de 0,9%/an depuis 2003 à l’exception de l’Allemagne dont
le PIB évolue à + 2,9%/an depuis 2008 et à + 1,24%/an en moyenne depuis
2003 !!!!
Le PIB étant une valeur
toute relative incluant d’une part les revenus des acteurs économiques
nationaux et non nationaux mais également ceux des personnes publiques (en soit
plus délicat à mesurer), l’évaluation optimum d’une économie tient in fine à l’étude
de sa balance commerciale.
La balance française des
biens et services est atone voire déficitaire depuis pratiquement une dizaine
d’années. Il faut remonter à 2004 pour avoir une balance positive à +9Mds€,
celle-ci étant négative depuis culminant en 2012 à -43Mds€ (dont une perte de
10Mds€ entre 2010 et 2012!) et nonobstant des facteurs positifs tels que la
baisse de l’Euro (passant de 1,59USD en 2008 à 1,35USD en 2013) et du brut
(cours du Brent de 140USD en 2008 à 108USD en 2013) soit un déficit pour les
marchandises de -60Mds€ en 2012 et ce, malgré un excédent des services de + 18Mds€ (contrairement
à l’Allemagne déficitaire de -24Mds€ !), excédent se retrouvant à
l’échelle de l’Euro-zone à +98Mds€, montant culminant à +252Mds€ (biens et
services) principalement portée par l’Allemagne (+152Mds€).
Ces simples constats
révèlent la prégnance de l’Allemagne portant par son industrie la balance
commerciale européenne au contraire de la France ayant opté pour l’abandon
conscient de ses usines et pour une économie de services faiblement créatrice
d’emplois valorisés voire valorisants (pour faire simple « on quitte
Renault ou Valeo pour McDonald ou Manpower » !).
Ces chiffres soulignent par
ailleurs la mauvaise direction de nos entreprises (multinationales notamment) avérée
d’une part par la médiocrité des échanges extérieurs des années avant l’entrée de
la France dans l’Euro-zone et d’autre part par l’adoption idéologique (cf
l’amitié franco-germanique) d’une monnaie appréciée de six fois la valeur de
notre économie, la preuve étant une balance des marchandises à -1,50%/an PIB contre
+6,75%/an PIB pour l’Allemagne entre 2000 et 2011 (in fine +0,6%/an PIB pour
l’Euro-zone).
Le PIB de la France est donc
stagnant car le ressort de la croissance à savoir le commerce des marchandises reste
déficitaire. Tant que les domaines couverts par l’industrie se rétréciront, des
barrières douanières aux frontières sur les produits importés n’y feront rien. Même
si la question de la monnaie reste importante, elle n’est que secondaire dans
une politique surréaliste prônant la tertiarisation de notre économie. Une
dévaluation permettrait certes d’améliorer à la marge la compétitivité-prix
mais n’éludera pas les décisions de réinvestissements productifs autrement dit
la question de la valeur ajoutée.
Les recommandations de baisses
de coûts du travail (charges patronales, salaires, flexibilité du contrat CDI)
ne sont en fait que des prétextes de reconstitution des marges perdues par la
baisse de compétitivité d’un capital productif assis sur des options financières
à court terme de retour sur investissement encouragées non seulement par les
établissements financiers bailleurs de fonds mais aussi par le double abandon
par l’Etat de ses prérogatives d’orientation de politiques industrielles et de
son rôle de correcteur des inégalités au profit des classes populaires et
moyennes, une répartition des richesses
se traduisant désormais par une fiscalité de moins en moins progressive et une
baisse de la dépense publique.
La France ne peut se
permettre à l’instar des USA d’un déficit commercial chronique (-437Mds€/-
540Mds USD contre 558Mds USD en 2011 et -357Mds€ en 2010) ne bénéficiant ni d’une
monnaie internationale dont le change est constamment ajusté par des politiques
de prophylaxie monétaire (Quantitative Easings), ni de bailleurs de fonds tels
que la Chine en contrepartie d’importation massive de produits à bas prix (230Mds€
de déficit commercial en 2009, 273Mds€
en 2012 !), ni a fortiori de sa position de gendarme du monde.
Une baisse du coût direct ou
indirect du travail aura donc le triple effet d’une reconstitution des marges
des entreprises, d’une baisse des recettes fiscales et in fine d’une
augmentation de la dette celle-ci n’étant maîtrisée ni à court ni à moyen terme
tant la dimension anxiogène de la baisse de la dépense publique et des
nécessaires transferts budgétaires vers l’UE (MES, Plan de sauvetages,
libéralisation sauvage intra-européenne) n’est comprise.
Le dernier point reste en
effet la politique absurde de la BCE dont le bilan poursuit sa dégradation d’une
part par la mise en collatéral d’actifs douteux des banques et d’autre part par
le refinancement bon marché de ces dernières non pas pour relancer le crédit à
une économie en récession mais pour palier à des comptes détériorés par un
trading nocif de spéculation. Le double
mouvement de refinancement et d’une mise en dépôt des banques dans les comptes
de la BCE permet ainsi à Draghi de contrôler une masse monétaire prise entre
une hausse des prix par les coûts (cours du Brent sur une tendance longue,
spéculations sur les matières premières) et le recul du PIB. En dépit d’une
politique à vue en dehors de toute légalité, la Banque Centrale a vu son bilan doubler
depuis 2007 pour atteindre 32% du PIB de l’Euro-zone au risque de provoquer une
défiance des investisseurs sur l’Euro et
à terme l’hyperinflation.
La création monétaire est
donc active mais non compensée par une destruction corrélative, les dettes tant
des banques que des entreprises ou des Etats n’étant pas remboursées: seule une
augmentation du taux directeur de la BCE motivée par une stagflation (inflation
par les coûts et récession) pourra
rétablir la confiance dans l’Euro et attirer les bailleurs étrangers, la
question des perspectives économiques se reposant.
Le risque d’hyperinflation
est-il pour autant réel à court terme ? Il le sera si le PIB de l’Euro-zone
accentue sa baisse autrement dit si la balance commerciale de l’Allemagne se
dégrade sur les marchés émergents. Aidée par des produits à forte valeur
ajoutée et présente tant dans la sphère économique russe qu’en Chine ou en
Amérique Latine, l’Allemagne restera performante qu’elle reste ou sorte de la
zone euro.