lundi 2 novembre 2015

Le jeu allemand et la crise des réfugiés (partie 2) 


L'Allemagne joue pour le moins une carte inattendue dans sa gestion du flux d'immigration clandestine (1) en provenance du Moyen-Orient et d'Afrique. Tout observateur du monde germanique sait que le peuple allemand n'a pas ou peu de tradition d'accueil des étrangers extra-européens au contraire de la France. 

L'Allemagne n'a d'ailleurs jamais pensé l'immigration ni en termes d'intégration ou d'assimilation ni même sous l'angle du différentialisme anglo-saxon (2). Nous avons vu dans les années 80 les nombreux problèmes d'insertions (professionnelles et sociales) des travailleurs turcs et par la suite les sentiments clairement hostiles envers leurs propres compatriotes de l'ex-RDA. 

Plus globalement, la Réunification achevée, des mouvements néo-nazis ont émergés dans des villes comme Leipzig ou Dresde à l'encontre des immigrés turcs mais aussi de travailleurs d'Europe centrale et de l'Est. Récemment enfin, la base électorale importante du parti néo-nazi NPD lui a donné une présence au Parlement européen depuis l'abrogation par la Cour Constitutionnel de Karlsruhe du seuil électoral de 3%. Aucun média ne s'est prononcé sur ce sujet, médias toujours promptes à dénoncer l'antisémitisme sauf quand il apparaît sous leurs yeux (cf l'Ukraine et le gouvernement pro-nazi de Petro Porochenko, le Hamas, les Frères Musulmans et l'UOIF en France (3), les courants wahhabistes et takfiristes en Europe (4)).

Comment expliquer dès lors au regard de cette histoire récente de l'Allemagne l'enthousiasme et l'insistance d'Angela Merkel à imposer une entrée massive de clandestins (approximativement 800 000 personnes pour 2015 et 2016 sous réserve de confirmation) quand le nombre d'immigrés légaux extra-européens en France est d'à peu près 200000 personnes par an? 

Comme le souligne à juste titre l'éditorialiste du WSJ Paul Craig Roberts dans un article publié par la Stratégic Culture Foundation (en français sur http://lesakerfrancophone.net/la-presse-prostituee-a-loeuvre/) ces déplacements sont principalement dus à la déstabilisation du Moyen-Orient (Syrie, Irak) et de la Libye (laquelle jouait un rôle économique important du temps de Kadhafi par les nombreux emplois offerts aux populations subsahariennes dans l'industrie pétrolière). 

Cette explication est cependant partielle. Pourquoi ces réfugiés se déplacent-ils vers l'Europe alors qu'ils ne maîtrisent ni les langues occidentales ni les us et coutumes? Pourquoi ce choix de l'Allemagne plutôt que la France ou l'Espagne plus ouverts à l'immigration? 

Cette deuxième question est corrélée à la première: 

- Quel est le statut réel de ces personnes? Fuient-ils des régions paupérisées à la recherche d'une vie nouvelle et d'un travail alors que l'UE compte au bas mot 26 millions de chômeurs ou cherchent-ils à se trouver un abri car leurs vies sont menacées? Enfin pourquoi ces déplacements comptent-ils essentiellement des hommes alors que le reste de la famille est censé être dans le dénuement le plus total? 

- S'il s'agit d'un mouvement économique, cela suppose que l'emploi soit déjà trouvé ou en passe de l'être par une coordination de la recherche dans le pays hôte à partir de celui d'origine de manière à assurer une fois nouvellement établi le renvoi d'une partie du revenu à la famille dans le besoin. Il ne me semble pas que ce schéma soit explicatif puisque l'essentiel de ces immigrés partent visiblement sans plan ni visa leur interdisant in fine toutes recherches sérieuses d'emplois sauf à se retrouver aspirés par les réseaux clandestins.  

Une autre question sans réponse: pourquoi choisir l'Allemagne plutôt que des Etats proches aux valeurs assimilables (essentiellement des sociétés islamisées)? 

Certes les conditions d'accueils au Liban (130 000 réfugiés syriens en début de conflit en 2011 à 800 000 dès 2013 et aujourd'hui à plus de 1,1 millions) sont déplorables mais des pays comme la Jordanie (plus de 630 000 dont 500 000 irakiens entre 2006 et 2011) en accueille proportionnellement beaucoup. Notons également que peu se réfugient en Iran pour la simple raison que la zone de conflit irakienne se trouve entre mais surtout que l'Iran continue d'accueillir de nombreux afghans fuyant l'instabilité d'un Etat pris entre les guérillas des Talibans et la présence calamiteuse des américains.

Il reste que les monarchies pétrolières (Emirats, Oman, Bahreïn, Arabie Saoudite) n'ont fait preuve d'aucune démarche d'accueil de ces peuples partageant pourtant comme eux la même foi en l'Islam. De même les Etats d'Afrique du Nord à l'exception de l'Egypte n'ont manifesté aucune velléité de soutien. (http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2015/09/02/accueil-des-refugies-syriens-la-turquie-le-liban-et-la-jordanie-en-premiere-ligne_4743310_4355770.html# ). 

Près de 2 Millions de réfugiés sont localisés en Turquie cherchant à remonter vers la zone économiquement atone qu'est l'UE alors qu'Ankara bénéfice d'une croissance de 2,9% (à la fin 2014 mais d'un chômage de plus de 11%). Ce qu'on peut ajouter est l'absence de tout soutien financier des USA et de l'UE aux Etats ayant accueilli ces déplacés (à l'instar de la profonde indifférence des mêmes pour les ukrainiens fuyant les combats dans le Donbass) sauf la proposition farfelue de l'Allemagne d'aider la Turquie en contrepartie de son entrée dans la zone (ce qui a stoppé net toute négociation sur un quelconque soutien). Il n'y eut de même aucune pression d'aucune sorte sur les monarchies pétrolières ni sur les Etats du Maghreb et les Etats d'Afrique subsaharienne principalement le Tchad. 

Si un reflux semble se dessiner depuis le début des frappes russes (http://fr.sputniknews.com/international/20151025/1019084369/refugies-regagnent-syrie-depuis-debut-des-frappes-russes.html), cette tendance doit être confirmée d'autant que le centre de gravité du conflit se déplace de nouveau vers Alep où vivent pas moins de 3 millions d'habitants. 

Le mouvement vers l'Europe ne semble pas pour autant se modifier. Il emprunte un chemin bien défini de la Turquie vers les Balkans puis vers l'Autriche et la Hongrie avant d'atteindre l'Allemagne. Les réfugiés africains s'orientent quant à eux vers la Grèce et non vers l'Espagne via le Maroc confirmant la Libye comme zone hors droit, offrant à un réseau de passeurs les possibilités d'un trafic lucratif de populations. La destination finale apparaissait être l'Angleterre mais la France, le Benelux ou l'Allemagne pourraient être des alternatives. 

En somme, toutes ces migrations impliquent d'une part le financement de la sécurisation des passages de frontières et d'autre part la logistique en transports, gîtes et services d'ordre induisant une recherche de réponse(s) à la question de l'organisation du déplacement de centaines de milliers de personnes, question que les médias français esquivent. 

A suivre

1) J'emploie ce terme à dessein dans une perspective nationale en opposition à la définition du Haut Commissariat aux Réfugiés qui qualifient ce flux de réfugiés. Le problème est aussi dans la sémantique utilisée car la définition du réfugié par le HCR ne correspond pas à celle du droit français inscrite dans une procédure de demande tout à fait officielle. Cf https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_d%27asile_en_France#Le_droit_d.27asile_et_le_statut_de_r.C3.A9fugi.C3.A9_dans_les_textes

2) On parle plutôt d'ethno-différentialisme comme il a cours dans la société américaine où chaque communauté vit en quelques sortes sur sa propre identité, son ethnie ou sa race supposée. Le différentialisme est la base idéologique du communautarisme. 

3) https://fr.wikipedia.org/wiki/Union_des_organisations_islamiques_de_France

4) https://fr.wikipedia.org/wiki/Takfirisme




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire